CODE DE LA RUE EN
MARCHE
Un petit pas pour
les usagers vulnérables, mais un pas de géant vers la sécurité des piétons
Les timides
modifications au Code de la route du 12 novembre 2010 en faveur des piétons et
des cyclistes suscitent l'ire des derniers défenseurs du tout-auto dans les
médias.
En
décidant qu'en traversée de chaussée, la priorité est accordée au piéton
s'engageant, alors qu'elle ne
l'était depuis des décennies qu'au piéton
engagé, le Décret du 12 novembre
2010 crée une révolution. Pour s'en convaincre il suffit de lire les messages
violents des internautes sur les forums automobiles, d'écouter les interviews de
leurs dirigeants associatifs, et les commentaires dans la presse. Toute cette
rage pour un mot ? direz-vous. Oui, parce qu'ils ont bien vu qu'il remettait
en cause un laissez-faire datant des glorieuses années du tout-auto où le piéton
"hors des clous" était devenu un gibier légitime.
Nous ne nous attendions
pas à la sortie inopinée du décret le 12 novembre 2010. Une lecture trop rapide
nous a donné à penser qu'il n'apportait rien d'essentiel et même un recul
puisque par exemple le piéton est appelé à manifester son désir de traverser.
Une seconde lecture nous a fait découvrir l'orientation plus convaincante que
donne la priorité accordée "au piéton s'engageant dans la traversée d'une
chaussée" à plus de cinquante mètres d'un passage piéton. L'ancienne formulation
évoquait le piéton prioritaire car "régulièrement engagé". Le choix
de remplacer "régulièrement engagé" par "s'engageant régulièrement" apporte
sécurité et confort au piéton, même si l'ajout de l'obligation de manifester son
intention est quelque peu restrictive. Mais les cris d'orfraies des associations
d'automobilistes et de leurs correspondants sur leurs forums nous ont confirmé
que ce "changement" était porteur de progrès.
Actuellement un très grand nombre de conducteurs ont l'habitude de ne s'arrêter
que contraints et forcés. Souvent c'est par ignorance du Code car ils croient
que les piétons n'ont pas de priorité sur la chaussée en dehors des passages
piéton. Ou ils s’exonèrent de
leur responsabilité en prétendant qu'ils sont suivis de trop près par d'autres
véhicules. Beaucoup affirment aussi qu'ils ne peuvent pas savoir que le piéton
qui se tient sur le bord du trottoir veut traverser. Tous les prétextes sont
bons. Cs sont ces arguments malhonnêtes que répètent à l'envi les défenseurs des
automobilistes sur leurs blogs ou dans la presse. Mais de quels
automobilistes ?
Maintenant, le décret joue sur les comportements et sanctionne sévèrement le refus de priorité et donc
1° il
oblige les automobilistes à revoir les articles du code pourtant en vigueur
depuis longtemps mais qui n'étaient pas appliqués.
2° il
les brusque sur la question des traversées hors passages piétons marqués. Et on
peut espérer qu'aux passages piétons sans feux, cette
priorité à l'approche ira de soi, car pourquoi un piéton s'approcherait-il d'un
pas décidé si ce n'est pour traverser?
Dès que
des accidents de piéton seront présentés aux tribunaux, il y aura des débats de
sémantique sur la différence essentielle de sens entre le piéton régulièrement
engagé et le piéton s'engageant régulièrement. En fait c'est ce choix d'un
terme différent qui porte l'espoir des changements de comportements que nous
souhaitons tous.
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Cliquez sur les liens
ci-dessous pour lire :
1° l'article du Figaro.fr
du 19 novembre 2010 reflétant les réactions agressives d'automobilistes
"en colère" devant les timides modifications apportées au Code pour confirmer la priorité des
piétons en traversée. Les arguments donnés s'appuient au mieux sur
l'ignorance du Code, au pire sur des contre-vérités.
cliquez
2° les points du décret
concernant les piétons,
cliquez
3° les points du décret
concernant les cyclistes, cliquez
19/11/2010 |
Le Figaro.fr
De nouveaux droits pour les piétons et les
cyclistes
|
Les nouvelles mesures suscitent l'inquiétude des
associations d'automobilistes qui s'estiment persona non grata en
centre-ville.
Pour beaucoup, les nouvelles dispositions du Code de la route portent
un nouveau coup à l'automobiliste et organisent un peu plus le règne du
piéton et du cycliste en centre-ville. Depuis mardi, l'usager in pedibus
voit ses droits renforcés. Il peut
dorénavant (1) traverser une
chaussée où bon lui semble en l'absence de
passage protégé à moins de 50
mètres de lui. S'il s'engage ou manifeste son intention de rejoindre le
trottoir d'en face, l'automobiliste doit
désormais lui céder le
passage. Une obligation qui ne doit pas être prise à légère. En cas de
non-respect, le conducteur sera verbalisé : soit 135 euros d'amende et
quatre points en moins à la clé.
Quant aux vélos de plus en plus nombreux, ils peuvent depuis mardi,
tourner à droite sans s'arrêter au feu rouge.
Un passe-droit qui ne
peut jouer toutefois que sur les seuls carrefours autorisés par les
maires et identifiés par une nouvelle signalisation. Les panneaux
devraient être prêts en début d'année prochaine.
haut de page
|
Commentaires de la FCDE
Les droits du piéton, ou la place des cyclistes
dans la voirie font partie des sujets qui fâchent beaucoup
d'automobilistes qui pourtant peuvent être à leurs heures, piétons ou
cyclistes exigeants.
En tout cas, l es associations d'automobilistes montent au
créneau contre ce qu'elles appellent les nouvelles mesures dans le Code
de la Route annoncées le 16 novembre 2010
Or ces mesures ne font pour l'essentiel que reprendre
en les précisant celles qui existaient déjà dans le code depuis des années. Mais en durcissant
les sanctions car les règles de priorité en faveur des piétons en
traversée de chaussée n'étaient généralement pas respectées.
Cet article reflète bien cette ignorance,
Un peu d'explication de texte :
1
- dorénavant : implique ici qu'avant le piéton ne pouvait pas
traverser où "bon lui semblait", ce qui est faux. N'insistons pas
sur le mépris que distille ce type de remarques. En l'absence de passage piétons à moins de 50 mètres, un piéton avait absolument le même droit. Mais trop d'automobilistes n'en
tenaient pas compte. Dorénavant, et cela est une nouveauté, il en
coûtera 135 euros et 4 points aux automobilistes qui ne cèderont pas le passage à un piéton
déjà engagé, faisant le geste de s'engager, ou manifestant de manière
claire à l'automobiliste son désir de traverser.
2 -
les termes passages protégés n'existent plus dans le Code.
3 - désormais
: implique qu'avant l'automobiliste
n'avait pas l'obligation de céder le passage à un piéton en train de
traverser une chaussée. Ce qui est faux, mais il est vrai que peu
d'automobilistes connaissaient ce point du Code et ceux qui s'arrêtaient
avaient peur des autres conducteurs.
4 - passe-droit : le terme passe-droit signifie une faveur illégale
accordée à une catégorie d'usagers. Or justement le Code dit la
Loi. Il est en revanche illégal de ne pas l'appliquer.
|
Articles du décret du
12 novembre 2010 concernant les piétons
1- Article R415-11 :
priorité aux piétons qui traversent
Modifié par le Décret
n° 2010-1390 du 12 novembre 2010 - art. 17
Tout conducteur est tenu de céder le passage,
au besoin en s'arrêtant, au piéton
s'engageant régulièrement dans la
traversée d'une chaussée ou manifestant clairement l'intention de le faire ou
circulant dans une aire piétonne ou une zone de rencontre.
Le
fait, pour tout conducteur, de ne pas respecter les règles de priorité fixées au
présent article est puni de l'amende prévue pour les contraventions de la
quatrième classe.
Tout
conducteur coupable de cette infraction encourt également la peine
complémentaire de suspension, pour une durée de trois ans au plus, du permis de
conduire, cette suspension pouvant être limitée à la conduite en dehors de
l'activité professionnelle.
Cette contravention donne
lieu de plein droit à la réduction de quatre points du permis de conduire.
Commentaires FCDE : La formulation ancienne
plutôt statique donnait la priorité au "piéton régulièrement engagé".
Engagé, c'est-à-dire,
ayant déjà mis le pied sur la chaussée ; régulièrement, c'est-à-dire
après avoir auparavant évalué 3 paramètres complexes pour un piéton qui n'est
pas nécessairement titulaire d'un permis de conduire, la visibilité, la vitesse
et la distance.
Toute la charge de sa sécurité pesait sur le
piéton lui-même, qui en cas d'accident, était généralement présumé responsable ,
selon l'expression courante depuis les débuts de l'automobile " de s'être jeté
imprudemment sous les roues du véhicule". Et pendant des décennies les
personnes les plus vulnérables, enfants, personnes âgées ou handicapées
restaient longtemps sans oser mettre le pied sur la chaussée à attendre l'âme
charitable qui daignerait s'arrêter.
Maintenant
le conducteur est tenu de céder le passage, au piéton
s'engageant
régulièrement.
Le passage du participe passé au
participe présent est porteur de l'espoir qu'il amènera un changement des
comportements des conducteurs. Cette formulation dynamique donne la priorité au
piéton en mouvement dès lors qu'il se prépare par sa démarche et sa gestuelle à
entreprendre la traversée de la chaussée.
Et pour donner bonne
mesure, il est précisé "au besoin en s'arrêtant", ce qui semble aller de soi,
mais qui permettra de combattre la tendance courante des automobilistes à faire
du gymkhana autour d'un piéton hors passage piéton plutôt que de s'arrêter.
De plus pour lever
toute ambigüité le piéton pourra aussi par sa gestuelle marquer clairement
son désir de traverser.
Alors, on n'entendra
plus de conducteurs fautifs s'exclamer "je ne savais pas qu'il voulait
traverser", puisque le Code énumère maintenant toutes les manières par
lesquelles le contact peut s'établir entre le piéton et l'automobiliste dans sa
bulle.
haut de page
2 -
Article R412-34 (Article
11) – Circulation piétons
Modifié par
Décret n°2010-1390 du 12 novembre 2010
- art. 11
I. - Lorsqu'une
chaussée est bordée d'emplacements réservés aux piétons ou normalement
praticables par eux, tels que trottoirs ou accotements, les piétons sont
tenus de les utiliser, à l'exclusion de la chaussée.
Ces dispositions ne s'appliquent pas aux aires piétonnes et aux zones de
rencontre.
I bis. - Les enfants de moins de huit ans qui
conduisent un cycle peuvent utiliser les trottoirs ou accotements, sauf
dispositions contraires prises par l'autorité investie du pouvoir de
police, à la condition de conserver l'allure du pas et de ne pas
occasionner de gêne aux piétons.
II. - Sont assimilés aux piétons :
1° Les personnes qui conduisent une voiture d'enfant, de
malade ou d'infirme, ou tout autre véhicule de petite dimension sans
moteur ;
2° Les personnes qui conduisent à la main un cycle ou un
cyclomoteur ;
3° Les infirmes qui se déplacent dans une chaise roulante
mue par eux-mêmes ou circulant à l'allure du pas.
III. - La circulation de tous véhicules à deux roues
conduits à la main est tolérée sur la chaussée. Dans ce cas, les
conducteurs sont tenus d'observer les règles imposées aux piétons.
Rappel de l’Article R412-35 Modifié par Décret n°2008-754 du 30 juillet 2008 -
art. 6
Lorsqu'il ne leur est pas possible d'utiliser les
emplacements qui leur sont réservés ou en l'absence de ceux-ci, les
piétons peuvent emprunter les autres parties de la route en prenant les
précautions nécessaires.
Les piétons qui se déplacent avec des objets encombrants
peuvent également emprunter la chaussée si leur circulation sur le
trottoir ou l'accotement risque de causer une gêne importante aux autres
piétons.
Les infirmes qui se déplacent dans une chaise roulante
peuvent dans tous les cas circuler sur la chaussée.
Dans une zone de rencontre, les piétons peuvent circuler
sur la chaussée mais ne doivent pas gêner la circulation des véhicules
en y stationnant.
Commentaires FCDE :
Simples mises en cohérence de l'article R412-34 pour exclure des
zones de rencontre et des aires piétonnes l'obligation faite aux piétons de
circuler sur les trottoirs s'il en existe. Précision donnée sur les conditions
d'utilisation des trottoirs par les enfants de moins de 8 ans, etc.
3 - Article R412-7
-Tout conducteur doit, sauf en cas de nécessité absolue, faire circuler son
véhicule exclusivement sur la chaussée.
I. Les véhicules doivent, sauf en cas de nécessité absolue, circuler sur la
chaussée. Toutefois, ils peuvent franchir un trottoir, à partir de l'accès le
plus proche, pour rejoindre ou quitter les accès carrossables des immeubles
riverains ou des accès non ouverts à la circulation publique. Ils peuvent
également le franchir pour rejoindre une autre chaussée s'il existe un
aménagement à cet effet.
Les engins d'entretien du trottoir peuvent y circuler dans l'exercice de leur
mission, sauf dispositions contraires prises par l'autorité investie du pouvoir
de police.
I.-Lorsque, sur la chaussée, une voie de circulation réservée à certaines
catégories de véhicules est matérialisée, les conducteurs d'autres catégories de
véhicules ne doivent pas circuler sur cette voie.
Les conducteurs de véhicules
motorisés ne doivent pas circuler sur une voie verte, ni dans une aire piétonne
à l'exception des cas prévus par les règles de circulation mentionnées à
l'article R. 411-3.
III. -Sous réserve de l'application des dispositions des deuxième, troisième et
quatrième alinéas du I, le fait, pour tout conducteur, de contrevenir aux
dispositions du présent article est puni de l'amende prévue pour les
contraventions de la 4e classe.
Commentaires FCDE :
Cet article qualifie la voie permettant de rejoindre l'accès carrossable d'un
immeuble comme trottoir. Le conducteur doit donc le franchir au pas. De même il
implique qu'il y a une discontinuité quand deux chaussées sont connectées l'une à
l'autre par un trottoir. Un véhicule devra rouler sur le trottoir au pas pour
aller d'une chaussée à l'autre. |