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lecture, l'article de Rue de l'avenir de Novembre 2012
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LA MARCHE ET L'ESPACE PUBLIC
Depuis quelques décennies, la
mobilité motorisée a marginalisé les déplacements à pied et créé un
environnement trop souvent hostile et agressif pour ses adeptes, mais cette
tendance n’est pas irréversible. Il est temps de reconquérir l’espace public au
profit des piétons.
Rue de l’Avenir, qui milite pour « une ville à vivre », publie cette fiche pour
inciter décideurs, techniciens et membres d’associations à replacer le piéton au
cœur du débat et plus encore dans l’espace public pour des déplacements à pied
sûrs, efficaces et confortables et pour le maintien d’une urbanité essentielle
au citadin.
La ville n’est pas seulement un espace de circulation ; c’est d’abord un lieu de
vie que l’on habite, où l’on travaille, que l’on visite, qui favorise la
rencontre et la discussion.
La marche donne accès à tous les autres modes de déplacement et autorise toutes
les libertés de mouvement en ville, y compris celle de ne plus se mouvoir. Elle
permet d’assurer le bien-être dans les espaces publics urbains.
La qualité de l’aménagement des espaces publics incite à marcher. Le
développement de la marche est un des critères de la réussite des aménagements
urbains. Mis en scène dans des espaces publics de qualité, les piétons se
respectent les uns les autres et sont mieux respectés par les usagers des autres
modes de déplacement.
Façon la plus naturelle de se déplacer et pratique partagée de la rue, la marche
est à la base de la qualité de vie et de la citoyenneté en ville.
1- Réhabiliter la marche pour reconquérir l’espace public
Pourquoi marchons-nous moins ?
Depuis la seconde moitié du XIXe siècle, la marche perd des « parts de marché ».
Mais pourquoi marchons-nous moins ?
Les modes de transports motorisés se sont progressivement imposés. Ils nous ont
permis de rejoindre des destinations lointaines plus rapidement et avec moins de
fatigue. Mais, ce faisant, ils ont aussi permis d’agrandir les distances : les
villes se sont étalées… et ont entraîné un développement accéléré de la
circulation motorisée.
C’est le cercle vicieux parfait.
Mais même pour des trajets courts les modes de transport motorisés se sont
imposés car ils épargnent de la fatigue et que tout a été fait pour les
faciliter. C’est ainsi que 25% des
déplacements motorisés concernent des trajets de moins de 1km malgré
l’extension des villes (Source ADEME).
En fait, pour aller plus vite, pour faire passer plus de trafic motorisé on a
développé une politique exagérément
favorable à l’auto, excluant voire méprisant les autres modes de déplacement au
cours des décennies écoulées. Ainsi ont été élargies les voies de circulation en
rognant sur les espaces piétons, notamment sur les trottoirs et en limitant les
zones de confrontation (les traversées piétonnes, par exemple) susceptibles de
porter atteinte à la fluidité du transit.
Le grand gagnant de cette « logique » est « logiquement » l’automobile,
devenue un mode de déplacement
indispensable. Les perdants, ce sont la marche, le vélo, les transports en
commun... Tous ces modes de transport ont été dévalorisés, perçus comme un
pisaller pour ceux qui n’ont pas accès à l’automobile.
La marche, un mode d’hier, d’aujourd’hui et de
demain
La marche est un mode plein d’atouts :
elle est accessible à tous ou presque, ne coûte quasiment rien, ne rejette pas
de polluant et/ou de gaz à effet de serre...
De plus, elle permet une activité physique régulière, raison pour laquelle
l’Organisation Mondiale de la Santé
la recommande fortement.
Associée à une bonne hygiène de vie, la marche diminue en effet les risques de
maladie cardio-vasculaire et
d’obésité, les troubles du sommeil... et, de ce fait, peut entraîner une
réduction sensible des dépenses de santé.
C’est dire que la marche répond pleinement aux enjeux du XXIè siècle :
• Assurer le droit à la mobilité pour
tous et renforcer la cohésion sociale
• Proposer un système de mobilité
économiquement supportable
• Lutter contre le bouleversement
climatique et les atteintes
aux milieux naturels.
Les villes se réveillent progressivement de plus d’un demi-siècle de passion
irraisonnée et imposée pour
l’automobile. Redonner place au piéton et lui assurer des déplacements sûrs,
efficaces et confortables relève tant
de la planification que d’aménagements de qualité (bordures
de trottoirs, plateaux piétonniers,
larges trottoirs et passages piétons) qui valorisent la marche mais aussi du
principe d’une gestion policée de la
ville pour faire respecter la règle commune.
Il est également nécessaire de mettre
en œuvre simultanément les moyens de déplacement complémentaires,
vélo, transports publics, qui complètent et renforcent la panoplie des
alternatives efficaces et attractives à l’usage de l’auto.
La ville piétonne est celle des courtes distances. Elle s’inscrit dans un
ensemble de quartiers qui ont chacun un centre regroupant équipements et
commerces. Ces caractéristiques urbaines doivent donc être pensées en amont des
politiques d’aménagement.
La ville doit être :
• Compacte :
les extensions urbaines sont recentrées et se font dans les enveloppes
existantes. Ainsi, les distances à parcourir n’augmentent pas.
• Accessible :
la ville est praticable quelles que soient les conditions physiques,
intellectuelles et sociales.
• Lisible :
on comprend facilement la continuité du trajet et la nature de l’environnement
traversé.
• Perméable :
la ville s’organise autour d’un réseau d’espaces publics rendant les quartiers
traversant. Les piétons sont libres, doivent pouvoir aller partout, aller au
plus court, s’épargner les détours et suivre leur "ligne de désir", flâner…
• Multifonctionnelle :
dans chaque quartier, on doit pouvoir trouver une diversité de logements,
d’emplois, de commerces, services, d’espace de loisir et de culture. Il n’est
pas nécessaire de traverser la ville pour aller acheter son journal.
• Animée :
les espaces publics et privés sont vivants et conçus à l’échelle du piéton.
A long terme ces recommandations conduisent à préconiser de nouvelles modalités
de développement des villes et à mettre en oeuvre des démarches urbanistiques de
qualité.
Entrefilet 1 avec illustration photographique : Chambéry est la première ville
en France à avoir donné la priorité aux piétons et reste depuis 30 ans une
référence. Toutefois, les aménagements favorisent aussi les cyclistes et
n’excluent pas l’automobile pourvu qu’elle respecte les autres modes. Le centre
ville est desservi par une navette électrique.
Réduire l’usage de l’automobile
Envisager une ville favorable aux pratiques piétonnes, c’est aussi renverser
l’approche traditionnelle de la place du trafic motorisé sur le plan du nombre
de véhicules et de leur vitesse.
La modération de la circulation est
une politique qui a pour objectif de diminuer le nombre et la vitesse des
automobiles en ville afin, en modifiant l’aménagement de la voirie et le
comportement des conducteurs, de préserver la sécurité des autres usagers de
l’espace public, de favoriser l’environnement et de stimuler la fonction
conviviale des quartiers et de la rue.
La réduction du volume du trafic motorisé s’appuie d’abord sur la mise en œuvre
d’une gestion rigoureuse du
stationnement. Elle implique une remise en cause des conditions actuelles
d’occupation de l’espace public par les automobiles en stationnement. En second
lieu elle repose, d’une part, sur une organisation
des circulations sur un réseau de voirie hiérarchisé dissuadant
en particulier les circulations de transit inutiles et, d’autre part, sur la
mise en service, en tant que de besoin, de parcs
relais avec des conditions d’utilisation attractives.
La maîtrise des vitesses, absolument fondamentale vis à vis de la sécurité
notamment, s’appuie sur un ensemble de mesures réglementaires et techniques
adoptées, (à l’exception de la Zone 30 qui date de novembre 1990), dans le cadre
de la démarche « Code de la Rue » initiée
à partir de 2006.
Entrefilet 2 : Le décret du 12 novembre 2010 renforce la protection des piétons
à l’occasion de leurs traversées. Ils bénéficient des dispositions de la loi «
Badinter » de 1985 qui permet à l’usager vulnérable, victime, d’être
intégralement indemnisé sauf s’il a commis
une faute inexcusable.
Toutefois, au quotidien le manque d’information sur la portée du principe de
prudence, qui est le respect du plus faible par le plus fort, et l’absence de
réactions des autorités publiques concernant l’inobservation des principes et
règles promulgués, aboutissent à banaliser les comportements incivils ou mettant
en danger la vie d’autrui.
Désormais, en complément de l’obligation de respect du plus faible par le plus
fort, trois dispositions permettent de réduire le nombre de véhicules et leur
vitesse :
• La Zone 30 : la voiture est prioritaire sur la chaussée mais doit, comme
ailleurs, laisser la priorité au piéton souhaitant traverser, les vitesses étant
limitées à 30 km/h.
• La Zone de rencontre : le piéton est prioritaire sur l’ensemble des véhicules
(y compris le vélo) dont les vitesses sont limitées à 20 km/h.
• L’Aire piétonne : la circulation de tous les véhicules est strictement
réglementée et doit se faire au pas. Le stationnement y est interdit.
Les vitesses limitées à 30 km/h devraient en milieu urbain être la norme et le
50 km/h, l’exception. Réduire la
circulation motorisée, apaiser les vitesses, faciliter la cohabitation entre les
modes de déplacement, permet de réduire les risques d’accidents et leur gravité,
et diminue le bruit et le stress... Précisons qu’en ville, les réductions de
vitesse n’ont pas d’impact sur la capacité des voies (de plus, la modération de
la vitesse intervenant en principe en même temps que la réduction du trafic, les
capacités peuvent être réduites).
Vélo, transports en
commun, voiture :
des accélérateurs
de piétons
Le cocktail écomobile
Utilisée seule, la marche ne permet pas de couvrir rapidement de grandes
surfaces, de transporter des charges, de s’épargner les aléas climatiques. Mais
couplée au vélo, aux transports en commun ou à une utilisation rationnelle de
l’automobile, le piéton peut atteindre n’importe quel point d’un espace et même
se déplacer avec des bagages.
L’ascenseur, l’escalator trouvent parfaitement, eux aussi, leur place dans
l’espace public et complètent la palette des modes de transport pour franchir un
dénivelé.
La ville accessible
Tous les piétons ne sont pas sur deux pieds et bien portants. Certains
utilisent une canne en guise de troisième pied, d’autres circulent sur des
fauteuils roulants, voient mal ou pas du tout, perçoivent difficilement la
complexité de l’espace. Sans oublier ceux ou celles qui poussent un landau,
portent un chariot plein au retour du marché ou traînent une valise.
En fait, nous sommes tous, à un
moment de la journée ou de la vie, ponctuellement ou durablement, une personne à
mobilité réduite. Ce qui fait que nous avons tous été confrontés à des
situations urbaines constituant des entraves à notre mobilité.
Agir sur les inadaptations de l’environnement lorsqu’elles sont identifiées en
tant que telles pour les marcheurs, est donc essentiel. Il peut s’agir d’un
chantier provisoire mais aussi d’un aménagement mal conçu, par exemple un
revêtement de sol glissant ou irrégulier, une signalisation déficiente, etc
Rendre la ville accessible aux "personnes à mobilité réduite", c’est donc une
modification radicale de la conception des aménagements assurant qualité et
confort pour la marche. C’est en effet comprendre que cela ne peut se réduire à
prendre uniquement en considération les déficiences organiques de certaines
personnes. Dans cet objectif, chaque détail compte.
Pour les trottoirs, par exemple, cela va concerner les
bordures, l’encombrement, la largeur.
La loi du 11 février 2005 fixe par ailleurs à 2015 l’objectif de mise en
accessibilité pour les transports publics et les établissements recevant du
public. Et même si beaucoup de retard a été pris vis-à-vis de cet objectif, les
efforts ne doivent pas être interrompus.
Rendre la ville
accessible aux
personnes à mobilité
réduite, c’est
l’aménager et la
rendre confortable
pour tous.
Informer les piétons, promouvoir la marche
Les distances à parcourir en ville incitent à renoncer à la marche. Pourtant, à
y regarder de plus près et à prendre en compte les parcours directs qu’une
voiture ne peut suivre, force est de constater qu’elles sont souvent
surestimées. Il est donc essentiel de mieux informer les citadins et les
touristes sur le potentiel de la marche en ville, leur indiquer les temps de
parcours d’un point à un autre, les parcours malins à suivre, bref leur faire
prendre conscience d’éléments que l’on aborde presque toujours avec le seul
regard de l’automobiliste.
De nombreux systèmes issus des technologies de l’information et de la
communication (TIC) sont aujourd’hui disponibles. Quelques panneaux
judicieusement placés dans l’espace public pourront offrir à tous ces
informations clés et favorisera en particulier le bien-être des touristes.
Promouvoir la marche comme mode de déplacement suppose aussi de développer
des services d’assistance permettant de la faciliter, voire de la permettre :
accompagnement à la mobilité pour les personnes souffrant de déficiences
motrices, cognitives ou sensorielles,
consignes ou possibilités de dépôts de paquets dans de nombreux lieux, services
de livraison peu onéreux pour les produits lourds ou encombrant (pas seulement
dans l’alimentation)...et la possibilité de s’arrêter et de s’asseoir (à quand
le retour des bancs dans l’espace public ?)
2- Requalifier l’espace public pour reconquérir la ville
L’espace public est un lieu de convergence entre :
• des préoccupations importantes dans le domaine de la sécurité
des déplacements,
• des impératifs de qualité de vie qui, progressivement, s’imposent pour des
villes agréables à vivre,
• une réflexion sur l’espace public lieu
d’expression de la vie sociale.
Son aménagement est révélateur de choix politiques et techniques. Mettre
le piéton au centre de ces choix
permet une approche différente qui apporte de nombreuses réponses en termes de
sécurité, de qualité
de ville et de vie sociale. Les formes architecturales et paysagères peuvent
contribuer à limiter les effets des
aléas climatiques -pluie, vent, soleil- et créer des espaces agréables grâce à
leur volumétrie et à la place
donnée aux plantations. Dans l’espace public, le mobilier a également un rôle à
jouer : des bancs pour permettre le
repos, regroupés pour favoriser les échanges, des candélabres diffusant un
éclairage doux et rassurant.
Toutefois, afin de ne pas encombrer exagérément l’espace public, il convient de
trouver des mobiliers
plurifonctionnels : des bancs utilisés comme bornes anti-stationnement, des
candélabres supportant les
panneaux directionnels, etc. Par ailleurs pour préserver son usage public un
travail (contrôle/sanction) de police
est indispensable pour empêcher que
cet espace soit encombré par le stationnement illicite d’automobiles et de
motos.
Utiliser l’espace
public comme
vecteur d’urbanité
et répondre à
la demande des
habitants.
Cette responsabilité ne pourra être réellement assurée par l’échelon communal
qu’avec l’adoption d’un texte sur la décentralisation et la dépénalisation du
stationnement. Enfin une attention particulière doit être apportée à la
prévention et à la diminution des nuisances sonores qui sont liées au nombre et
à la vitesse des véhicules motorisés et sont néfastes pour la santé.
Le plaisir de la marche, ses aspects conviviaux, ses apports en matière de santé
commencent à être valorisés par de nombreux citadins. L’augmentation prévisible
du coût de l’énergie en fait un mode de déplacement à favoriser au plan
économique. En complément des contraintes sur l’automobile et d’une autre
politique urbaine, il faut rapidement créer
les conditions nécessaires à un renouveau de la marche par une éducation
citoyenne (en particulier à l’égard
des parents d’élèves et la mise en place des pédibus), par des aménagements
confortables, par une signalétique claire et par l’organisation des relais avec
les transports collectifs, complément indispensable des moyennes distances. Les
gares, les établissements d’enseignement, les centres-villes, les lieux générant
d’importants flux de piétons doivent trouver des espaces piétonniers à la mesure
de ce flux et amorcer aux alentours la requalification des voiries en espaces
public.
Des villes innovent
Le Plan piéton de Genève, démarche
pionnière il y a quinze ans, avait pour but de promouvoir la marche en
développant un courant de sympathie autour de cette pratique. Il propose une
dizaine de parcours pour faire
découvrir la ville et montrer qu’il est facile d’y circuler à pied. Un plan
largement diffusé, indiquant les temps de parcours entre les points de repère de
la ville, montre que la marche est efficace.
Le Plan piéton de Strasbourg, adopté le 23 janvier 2012, constitue une nouvelle
étape dans la conception des mesures en faveur des piétons. La ville affiche de
bons résultats : les déplacements à vélo représentent 8 % des déplacements et la
marche en représente 33 %. Cependant, le diagnostic a fait apparaître que, si
les quartiers anciens bénéficient d’un réseau de voirie dont l’échelle est
adaptée à la pratique piétonne, les quartiers récents sont moins bien irrigués
et en particulier les quartiers d’habitat social.
L’étude a consisté, d’une part, à identifier les pôles urbains et les principaux
générateurs de flux, d’autre part, à recenser les coupures urbaines et les
secteurs où le confort des piétons (largeur des trottoirs) n’était pas assuré,
enfin, à définir des itinéraires majeurs reliant les centres de quartiers entre
eux. Ces itinéraires constituent la base d’un réseau qui sera progressivement
équipé.
Les grandes orientations de la politique piétonne s’appuient sur dix actions
principales :
1 promouvoir la marche,
2 accorder plus de place aux piétons,
3 désamorcer les conflits piétons / vélos,
4 utiliser les documents d’urbanisme pour améliorer
la perméabilité piétonne du territoire,
5 instaurer le « 1% piéton » à l’occasion des projets de transport collectif (BHNS,
tramway)
6 généraliser la démarche des « pédibus » dans les écoles publiques primaires de
Strasbourg,
7 renforcer la perméabilité piétonne sur les axes à 50 km/heure,
8 mieux traiter les carrefours pour le piéton,
9 planifier les ouvrages d’art stratégiques du réseau piétonnier,
10 créer un réseau piétonnier magistral reliant les centralités des quartiers.
La morphologie particulière de l’aire urbaine strasbourgeoise, qui comporte de
multiples coupures urbaines créées par les nombreux cours d’eau et les
infrastructures routières et ferrées, a mis en évidence les contraintes qui sont
autant de freins à la pratique piétonne. Même si ces contraintes sont moins
présentes dans d’autres villes, le diagnostic de Strasbourg apporte des éléments
de méthode applicables à tous les sites.
La mise en œuvre d’un document stratégique en faveur des piétons répond au
besoin identifié de disposer d’un
projet global. Projet qui unifie les différentes initiatives ponctuelles dans un
document général assurant la
cohérence des actions dans l’espace et dans le temps.
La ville de Dijon, dans le cadre de la mise en œuvre du tramway et de la
reconquête de son centre historique, a initié une démarche de même type que
celle de Strasbourg, mais adaptée à la réalité locale. L’agglomération
mulhousienne, de son côté, a adopté un "Schéma directeur des itinéraires
pédestres". L’une des orientations du Plan de Déplacements Urbains de Lille
consiste à faire de la marche à pied un mode de déplacement à part entière. La
ville de Paris s’apprête elle aussi à lancer un plan « Paris Piéton »… On le
voit : dans de nombreuses cités et agglomérations, un changement de modèle
s’amorce, qui s’oriente vers une reconquête de la ville au profit des piétons.
La recherche
La recherche se préoccupe des piétons ; un programme européen a d’ailleurs
rendu ses conclusions en 2010.
Parmi les nombreuses recommandations formulées par les groupes de travail
internationaux et pluridisciplinaires
qui ont planché sur la question, on peut citer la nécessité
de mettre la marche au centre de la vision prospective
sur les déplacements et au premier
rang de l’ensemble des modes.
Dans cet esprit, il est nécessaire d’évaluer les coûts réels des déplacements
automobiles, notamment certains coûts induits qui ne sont jamais pris en compte
et de développer des méthodes permettant de procéder au comptage
des piétons, catégorie généralement oubliée des diagnostics. Il faut notamment
aménager des espaces publics confortables mais aussi créer une ambiance urbaine
attractive car il s’agit non seulement de se mouvoir mais également de s’arrêter
et de séjourner dans l’espace public. Faire en sorte que le piéton ait une
présence visible, rassurante et que les usagers les moins alertes aient la
possibilité de s’arrêter.
Les conclusions de la recherche évoquent la nécessité de s’intéresser à des
secteurs étendus et non pas au seul linéaire des itinéraires et aussi de
travailler sur les espaces publics des quartiers des villes périphériques,
souvent délaissés au profit des pôles urbains des villes centres.
Marche et commerce
Depuis quelques années, il semble que le commerce de proximité redevienne
attractif pour de nombreuses raisons : prix du carburant qui dissuade les
visites aux centres commerciaux périphériques, présence de moyennes surfaces en
ville, amélioration de la qualité des espaces publics des pôles urbains et des
transports collectifs, etc. Or, le
piéton est le premier client du commerce de proximité pour autant qu’il puisse
louvoyer d’une boutique à l’autre, en raversant sereinement les chaussées… ce
que ne rend pas possible un mur de voitures continu! Ces tendances sont liées à
des modes de vie qui changent en raison e l’évolution du contexte : allongement
du temps de vie, réduction de la taille des familles, nouvelles modalités de
travail. Elles doivent être accompagnées. La réflexion sur les déplacements à
pied est un fil conducteur qui aborde de très nombreux aspects de la vie urbaine
et
notamment l’aménagement, l’économie résidentielle, les transports collectifs,
les modes actifs et la structuration
de l’agglomération en réseau de centres de proximité.
En conclusion, mettre en oeuvre la ville à vivre
Pour accéder à la "ville à vivre " à laquelle nous aspirons, deux
démarches sont envisageables. La première, c’est la politique
des petits pas : le décideur procède
peu à peu au changement d’aspect de la ville. Par exemple, lorsque des travaux
de voirie sont indispensables (pose de canalisations, réfection de la bande
roulante..), au lieu de refaire à l’identique et rétablir les fonctionnalités,
il introduit de la nouveauté dans la lecture du quartier, dans sa pratique
(agrandissement des trottoirs, suppression de places de stationnement, pose de
mobilier urbain, voire transformation d’une rue classique en zone de rencontre).
La seconde, c’est une politique plus
ambitieuse : le décideur prend des
mesures d’ampleur. Par exemple, un nouveau plan de circulation, la
généralisation du 30 km/h en ville, l’extension d’une zone de rencontre etc.
Mais cela nécessite une large concertation avec les habitants, les comités de
commerçants, les conseils de quartier, les utilisateurs contraints de la voiture
(infirmières, dépanneurs, artisans, taxis, etc.).
Dans tous les cas, l’élaboration d’un document de cadrage (plan
piéton, schéma directeur des modes actifs, plan de déplacements urbains)est
indispensable pour assurer la cohérence des actions dans l’espace et dans le
temps.
Les retours d’expérience de Strasbourg et d’autres villes qui redonnent leur
place aux piétons seront très utiles
pour analyser les modes opératoires les plus pertinents. Il faudra toutefois
garder à l’esprit le fait que chaque site urbain
possède des caractéristiques spécifiques et des contraintes induisant des
logiques de mise en œuvre différentes et adaptées.
Pour en savoir plus :
www.ruedelavenir.com/themes/pietons-ca-marche/
Rédaction : Travail collectif de l’association
Responsable de la publication : Gilbert Lieutier
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